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En bordure de
voix, corps et imaginaire dans la chanson réaliste
Au siècle dernier, dans la période de
l’entre-deux-guerres, dans les rues, sur les scènes de
music-hall et de cabaret, à la TSF,
les chansons du répertoire réaliste se font entendre ;
elles deviennent populaires. Ce réalisme-là n’est pas
celui de la critique sociale, il parle de souffrance, de
fatalité, de deuil. Ce sont des voix de femmes qui vont
porter ces chants du drame personnel ou commun et
devenir figures héroïques de ce sombre réel. Comment
cette connivence peut-elle s’établir ? Ce texte se
proposant d’envisager la chanson à travers le style
vocal, analyse les liens existant entre passion - cette
forme paroxystique de l’amour - et voix ; entre passion
de la voix et incarnation féminine de l’interprétation
de ces complaintes intériorisées.
Au-delà de la référence explicative aux cadres
historiques et idéologiques permettant de comprendre ce
registre émotif des chansons, il s’agit d’aborder les
questions relatives à la conceptualisation de la voix, à
l’humus intuitif et sensible dont son écriture naît et
dont elle se nourrit.
Si la chanson est essentiellement synthèse, unité de
mots, de sons et de sèmes, le discours sur la chanson
est majoritairement analytique et séparateur. Elle est
partition pour le musicologue. Elle est message
thématique, signal événementiel pour qui se préoccupe
des sciences de l’homme et des sociétés. Dans cette
division historique du travail intellectuel sur l’objet-chanson,
peu d’études se sont intéressées à son oralité, à ses
circonstances de (re)création et d’écoute, d’abord
difficiles à saisir en ethnographes, puis difficiles à
commenter théoriquement. Plus rares sont encore les
tentatives d’approche par leur fondamentale vocalité.
C’est à partir du répertoire dit réaliste des années
1920-1950 en France, principalement interprété par des
femmes, que j’ai pour ma part, choisi de centrer mes
recherches sur le thème de la voix, de l’expression, de
l’émotion vocales qui deviennent alors les médiatrices
privilégiées de ce chanter populaire des cieux, des
rues, des mondes, des amours, des errances sombres. Ces
voix s’incarnent dans des silhouettes, des visages, ceux
de Berthe Sylva, de Fréhel, de Damia, d’Yvonne George,
de Piaf pour ne citer que les figures passées à la
postérité. Mon analyse à travers les archives sonores et
filmiques, s’attache à saisir tout le théâtre de la voix
de cette chanson de la vie captée par son destin. Il y a
là toute une esthétique du tragique quotidien. Ces
interprètes en portent l’art et la passion. Mes
investigations tendent à en décrire les traces, à en
évoquer les soubassements anthropologiques et les
résonances culturelles. Si je choisis le terme
d’évocation, c’est qu’il y a bien des problèmes
théoriques et méthodologiques dans cette entreprise de
conception et de restitution des sens et des
sensibilités du chanter par le geste, le grain de la
voix, « cette matérialité du corps surgie du gosier »,
ce punctum si prenant et si évanescent à la fois
(Barthes, 1982, p.236-245). Le premier obstacle réside
dans le fait que pour étudier ces chansons, ces voix du
pathétique, il faut d’abord accueillir sans résister la
vague de leur blessure.
Dans le contexte urbain d’une prolétarisation accrue,
des femmes proches des marges de la prostitution
chantent à nouveau la complainte des rues. Dans le
contexte des naufrages intimes et sociétaux de l’après
première guerre mondiale, l’univers chansonnier stylise
ces rudesses et ces mélancolies. Ce sont des « femmes en
noir, entrées dans la chanson vécue comme on entre en
sacerdoce » qui vont sur scène, incarner ce souffle de
la mort, de l’ombre et cette flamme (S.Hureau, 2003).
C’est par leur voix, ce signifiant qui dit sans dire et
qui est par conséquent, tout à fait susceptible de
laisser passer toute l’opacité des douleurs, qu’elles
habitent et communiquent cet émoi nocturne de la chanson
réaliste. L’histoire de la chanson, l’histoire nationale
et la mémoire commune ont fait de la chanteuse réaliste
une icône de la voix déchirante. Pour comprendre cela,
nous aborderons d’abord les liens fondamentaux existant
entre passion et voix, puis nous demanderons plus
particulièrement comment ces liens se symbolisent et se
tissent dans leur chant, comment ils se condensent en
une sorte de fascination doloriste que Piaf haussera à
son acmé et que cadreront, sans pouvoir l’expliquer
totalement, les institution et culture religieuses de la
III° République.
Sonorités
passionnelles
Le répertoire de genre réaliste de cette période de
l’entre-deux-guerres parle d’amour, de tourment, de
souffrance et de chute ; sentiments auxquels ces
interprètes féminines dédient leur voix. Leur chant
deviendra le miroir vocal de ces états d’intense
passion. Il emportera le public de l’époque et bien
au-delà, il gagnera l’adhésion populaire de plusieurs
générations. Mais il est vrai que ce scénario de
condensation expressive entre chair de la voix et
mouvement brûlant, souffrant des passions s’adosse tout
d’abord au temps long de l’histoire et de la
civilisation.
En effet, si l’on examine la toile de fond de ce théâtre
émotionnel, on constate que voix et passion ont ensemble
leur destin culturellement et psychiquement liés. C’est
la scène mythologique qui nous livre l’image d’Écho,
aimante, ombre de voix, privée d’amour et dépossédée
de la parole signifiante. C’est la scène spéculative de
la philosophie qui associe nativement affects et langage
articulé ; c’est Jean-Jacques Rousseau, par exemple,
dans son « Essai sur l’origine des langues », qui
propose un enracinement du verbe humain dans sa musique
immanente, dans les mouvements de la réceptivité
auditive, les sursauts pathétiques de l’être et de
l’agir. C’est plus immédiatement, le vécu des
fulgurances amoureuses qui grave en nous le message
évident d’une telle affinité. Sans oublier les scènes
littéraires qui, de figures romanesques en incantations
poétiques, nous en ravivent les miroirs et les moires.
Puis au final, ce sont sans doute les chants et les
chansons qui, de leurs plus lointaines traditions,
signent au mieux, délimitent au plus près et au plus
familier aussi, cette coïncidence littérale et
métaphorique entre voix et passion. En effet, passer au
chant, c’est entrer dans des modulations intonatives
intenses, dans une dramatique des souffles, c’est ipso
facto s’embarquer, être dans le moment épiphanique des
ardeurs, qui suppose la création d’un espace, d’une
communauté fusionnelle d’écoute et s’effectue dans un
acte de célébration émotionnelle du monde, à un seuil
que la phénoménologie a pu désigner comme seuil de « passionalisation »
du corps (Parret, 2002, p.34).
Pulsion scopique et pulsion vocale sont les objets
privilégiés de l’énigme d’Eros. Il est des passions,
l’investigation psychanalytique, la tradition romanesque
nous le rappellent, qui se déclenchent sur un
véritable coup de foudre vocal (Assoun, 2001, p.156).
Puissance du premier regard, pouvoir de la première
voix convergent dans l’humanité de la sidération
amoureuse. À la fois essentiellement impalpable et
cachée, mais tellement tactile et tellement saisissante,
la voix contient cette équivoque constitutive, ce
mystère augural d’une présence/absence qui la rend tout
particulièrement complice de l’acte passionnel. Elle en
est à la fois la transe et le symbole. Immatérielle,
elle donne un aspect tangible à ce sentiment fou
d’invocation de l’autre qu’est la forte captation
amoureuse. Mais cette incarnation en est aussi la
mystique.
De la coïncidence troublante entre voix et passion, on
peut entendre que « la passion est destinée à
être mise en musique » (Assoun, 2001, p.159). On peut
entendre que le chant n’est que le prolongement modulé
des silences, le sens soufflé de cette syncope commune,
qu’il en raconte la légende, qu’il est dicté par
l’enchantement inouï de ceux qui, plus qu’à l’ordinaire
des cœurs et des corps, aspirent et soupirent. Que les
voix, que leur chant puisse se donner, au ras des ondes
sonores, comme inspiration, expiration de la passion,
c’est pour la période et le genre chansonnier qui nous
occupent, la rencontre d’Yvonne George et de Robert
Desnos qui en fournit l’exemple le plus achevé. Cette
aventure de la chanteuse et du poète nous servira de
première référence pour indiquer, et déjà dessiner notre
choix d’appréhension des chansons, au plus proche de
l’habitacle, de l’écriture sensibles des théâtralités et
des poétiques de la voix.
Robert et Yvonne : deux personnages certes assez
discrets, largement oubliés, mais tout de même, inscrits
dans l’histoire. Ce duo constitue une sorte de figure
idéale témoignant, pour la période que nous étudions, de
cet état de fascination où l’amour à la voix chantée se
mêle. On est en 1925.Yvonne George est chanteuse de
music-hall. Robert Desnos est poète, tôt venu au
mouvement surréaliste dans les premières fièvres
expérimentales, celles des « effusions verbales » entre
veille et sommeil, celle de l’écriture automatique.
Quelques années plus tard, en 1929, Yvonne George meurt.
Robert Desnos tente de la faire revivre dans le chant du
poème, dans un recueil intitulé « A la mystérieuse ».
Mais c’est dès les premiers moments de leur rencontre
que Desnos, alors journaliste occasionnel à Paris-Soir,
reçoit ce choc émotionnel d’une musique vocale et
consacre quelques articles éblouis à l’interprétation
d’Yvonne George chantant à l’Olympia.
« Las de l’inexplicable tristesse du temps
Nous nous réfugions au music-hall…
Mais voici qu’une femme …
Visage d’aventure et yeux évocateurs
Menue sur la scène immense
Geste rare et cruel…
Voici que sa voix émouvante s’élève …»
Ces premiers mots d’amour dédiés à la voix d’une
femme « dont l’étrave gigantesque prend l’âme des
spectateurs », sont animés par, ce que l’on pourrait
nommer, une érotique de l’apparition. Desnos ne décrit
pas la voix d’Yvonne comme un musicologue ou un
mélomane. Il suit des yeux cette voix ; il la saisit
dans ses jeux d’ombre et de lumière.
« Mimique éloquente de comédienne
Mimique poussée au plus haut du pathétique
Cette femme apparue nous parle
Au nom de l’amour et du désir…
Le silence s’impose à toute une salle frivole
Quand cette chanteuse étonnante prend la parole».
Yvonne George s’inscrit dans un chanter du tourment
tragique : l’amour, la perte, la mort et la nuit s’y
répondent dans un rythme à trois temps, sur tempo
dansant, parfois griffé par la morsure d’une modulation
parlée, d’un mot étouffé et dont la palette expressive
est particulièrement sensible à travers son
interprétation de la chanson ‘Pars’, dans un
enregistrement de1926. En effet, le répertoire d’Yvonne
George appartient à ce fleuve des chants de la fatalité.
Bien des peuples y confieront leurs plaintes. Et que ce
cours du chant soit issu des peuples nomades
d’Andalousie ou d’Anatolie par exemple, il transmet
toujours, évoquant amour humain ou bien amour divin, ce
lyrisme des larmes enfouis qui, dans la durée lui garde
son dynamisme rituel et sa valeur sacrée.
« Si je savais que ma mort
Pourrait te faire pleurer,
Pour une larme de toi
Je me laisserai tuer »
scande le cante jondo, en ce poème anonyme de
l’amour andalou (trad. Mano, 2001).
« Je suis venu en ce monde trompeur et je le quitte
Mon âme je n’ai pu trouver d’amante plus pure que toi
Je me suis blessé et j’ai baigné dans le sang rouge
Je n’ai trouvé personne pour laver le sang de mes
mains »psalmodie le barde oriental, Pir Sultan Addal,
inspirateur de la chanson populaire traditionnelle des
Alévis de Turquie.
Yvonne George, astre aimé par/dans sa voix, appartient à
cette catégorie de chanteuse écorchée qui, vouée à leur
chant, appendue à son extase éphémère, s’y consume corps
et âme. On pense à des personnages comme Fréhel,
Lys Gauty, Piaf pour d’autres temps, à Catherine
Ribeiro, Barbara pour la génération d’après la seconde
guerre mondiale. Ce sont là de littérales voix de la
passion, celles où le désir de l’Autre s’est mué en une
effusion du chant, devenu source de sombre sublimation,
ancrage d’éclat et d’éclipse de vie, devenu « manteau
des peines » (Bertin, CD,1996), soutenu par cette
autre force, cette force de la douleur qui survient
« comme un deuxième amour » (Duras,1983).
Yvonne George et Robert Desnos : leur rencontre
passionnelle, à travers l’illumination de la voix
chantée, condense un ensemble de traits paradigmatiques
contenus dans nos interrogations, explorations
ethnologiques de ces images musicales du monde noir des
vies, des villes, des marges. En effet, leur rencontre
met l’accent sur cette mutation scénique de la chanson,
sur l’invention de style, de thème et de couleur
parcourant l’univers esthétique, affectuel des
répertoires néoréalistes, alors portés à leur acmé, par
des femmes vibrantes, dans les années de
l’entre-deux-guerres du XXè siècle. Leur rencontre
souligne l’horizon d’attente des sensibilités
individuelles et collectives, assaillies par cette
étrange soif d’abandon au pathétique ; car dans l’onde
de mort de cet après-guerre si meurtrier beaucoup se
laissèrent gagner par ce « deuil fasciné de l’âme », cet
état de fatale mélancolie qui, à d’autres périodes
historiques critiques, contribua à produire cet humus où
naquit par exemple, le genre noir dans le roman
(Lebrun,1982, p.95). Leur rencontre place l’écoute du
geste vocal, la réception de ses enveloppements,
l’écriture de ses grammaires comme meilleurs liens
d’intelligibilité à l’aventure, à la culture historique
de ces chansons.
Le motif qui m’anime dans ce choix raisonné d’une
traversée de la chanson par l’émotion et le secret des
voix, est aussi dicté par le corpus, le terrain de
référence, comme je viens de le suggérer. On le sait,
dans les goguettes du XIXè siècle, se sont transmis des
chansons séditieuses, révoltées (Duneton,1998). Avec
toute la puissance évocatrice, toute la rapidité de
propagation de cet art éphémère -la chanson- Charles
Gilles, Eugène Pottier, Jean Baptiste Clément ont chacun
inventé un répertoire mettant au centre de la geste
chansonnière des peuples, la crise sociale ouvrière. Ce
transport de mélodies, de refrains, de rythmes inscrit
au cœur du verbe militant irriguera longtemps les
mémoires et les colères, tout un élan collectif de
passions publiques. Pourtant les scènes de spectacles
vont offrir d’autres figures du chanter populaire et ces
nouvelles figures plus plaintives qu’insurgées vont
bientôt, dès les années 1920, occuper la plus grande
place.
On passe d’un dire réaliste modulant message et lyrisme
d’un engagement à un art chansonnier mu par le lyrisme
plus opaque de la souffrance, car instillé pour
l’essentiel, par le toucher vocal de l’interprétation.
La sémiotique des voix devance alors la sémantique des
paroles. « Ces babioles de mots, je m’en sers comme d’un
fil rouge, d’un tracé souvent mal fait, qui s’arrête
sans fixer la totalité pensive » du chant affirme en
novatrice éclairée Yvette Guilbert. En effet, c’est
elle, artiste de la fin du XIXè siècle, créatrice d’une
nouvelle théâtralité gestuelle et vocale dans le chant
populaire, parfois rivale d’Yvonne George sur des
répertoires communs, qui va rédiger et éditer en 1928,
un véritable traité de l’interprétation, puisé à son
expérience de diseuse de café-concert, puis de cabaret.
C’est elle qui explicite déjà ce rapport de la chanson à
un imaginaire plastique et visuel affirmant qu’ à la
pure prononciation, « il faut ajouter l’art d’allumer et
d’éteindre les mots, de les caresser ou de les mordre,
de les envelopper ou de les dénuder, il faut y
joindre ce sens visible, vivant, peint, sculpté» (Y.Guilbert,1928).
C’est ainsi que des figures féminines apparaissent,
elles deviendront de véritables allégories de cet art
renouvelé des anciennes complaintes racontant l’histoire
des parias et des gueux, les déplaçant plus
universellement peut-être, vers une poétique du
tressaillement devant un destin d’enfance, de désamour,
de déchéance que l’on défie et auquel on consent tout à
la fois. Ces femmes vibrantes par le sentiment et la
voix s’appellent Berthe Sylva, Fréhel, Damia, Yvonne
George, Germaine Lix, Andrée Turcy, Lys Gauty, d’autres
encore et la môme Piaf, bien sûr.
Le corps et
l’insularité de la voix
Dans des dramaturgies scéniques de l’ombre et de la
lumière, déjà bien rodées, une femme comme Damia invente
la silhouette épurée de la chanteuse réaliste française,
à robe noire. Elle fera des émules ; car ce théâtre noir
et blanc enchâsse la voix, son insularité, en un
véritable écrin qui porte à écouter, à accueillir les
inflexions du chant sur les dévoilements du visage de
l’interprète, sur les ciels du regard et la rime des
mains. Dans son rapport frontal à la salle, l’interprète
occupe le centre de son chant, délimitant ainsi une
esthétique de l’intériorité, une catharsis des solitudes
que les fondements en soient sociaux ou privés.
S’attacher à la voix, c’est faire la part belle à la
dominance des signifiants ; c’est suivre la vague de
cette écriture aérienne, la vague des modulations et des
souffles où tout le corps est signe, où tout l’espace de
la corporéité visible – horizon du geste et de son
décor, paysage de la face, lisière des cheveux, des
tissus – tend à réverbérer l’élan sensitif du corps
audible, tend à livrer pour sa propre reconnaissance et
pour la fascination de l’œil, l’image du corps invisible
de la voix. S’attacher à la voix, c’est également
envisager cet inter-corps des sujets, cet inter-corps de
la réceptivité que suscite l’enveloppe synesthésique de
la voix. En effet, c’est souvent dans le tissé perceptif
des chansons que se fixait, que se fixe un sensorium
commun, que se cultivent de l’amateur aux fans, des
passions identificatoires, que s’ébauchaient et que
s’apprennent encore des sensibilisations au collectif, à
ses légendes, peut-être même au récit, à l’histoire des
peuples, voire à leurs épanchements les plus
incandescents et les plus indicibles : mystérieux
punctum du flamenco, du fado, du blues, des mélisses
arabo-musulmans.
Les premiers raisonnements sur la voix sont
philosophiques. Lucrèce dans De rerum natura,
décrit la voix comme une morsure, Descartes dans le
Traité de l'homme, la décrit comme un chatouillement,
l'un inaugure, l’autre poursuit toute une tradition
théorique d’approche tout à la fois somatique et
phono-esthétique des surgissements vocaux, tantôt
entailles, tantôt caresses. Á suivre la logique des
signifiants du chanter, dont nous venons de signaler
l’importance, il nous faut pour ces chansons, souvent
interprétées par d’anciennes goualeuses des rues, entrer
dans une physique de cet enchantement passionnel
innervant leur imploration vocale. La Pierreuse qui
chante son drame, selon Yvette Guilbert, « regarde les
yeux dilatés, fous de fièvre, en proie à une frayeur
mortelle, son amant marcher vers la mort » (Guilbert,
1928, p.114).
Dans les limbes de la voix, le souffle. Onde affectée
par la moindre humeur, le moindre vacillement. Or ces
chansons livrent leur réalisme respiratoire en 'gros
plan'. On y entend l’alternance précipitée de l’inspir
et de l’expir, les points de suspension de l’air, la
ponctuation des soupirs dans leurs jeux de variations
pouvant être tantôt érotiques, tantôt macabres.
Trois exemples particulièrement frappants suffisent à
illustrer ce frémissement taillé à même la chair de la
voix. C’est ‘Pars’ que chante Yvonne George en décembre
1926, c’est ‘Obsession’ interprétée par Suzy
Solidor en 1933, et c’est ‘Le grand voyage du pauvre
nègre ’ interprétée par Edith Piaf en 1938. En premier
lieu, c’est par cet aveu primordial du souffle que ces
voix – bien loin de la spiritualité jubilante des
vocalises lyriques ou sacrées – s’affirment comme voix
du corps rapproché, intime, engageant dans le trouble
méconnu d’un désir et d’un abîme.
À l’écart des lois impérieuses du chant sublime, ces
styles de voix du chant vécu ou réaliste, sont reliés à
la tradition des chansons populaires d’Europe, et
mobilisent, elles aussi, toutes les ressources
contrastées de cette mise en écho du corps dans la voix.
Au centre nerveux de ces voix incarnées, l’honneur
revient à la rugosité du timbre, à cette résultante du
son laryngé en prise directe avec tout le corps, à ce
paramètre complexe de la résonance phonatoire, à cette
tension qui dit la vie exposée, usée, brûlée (Vives,Vinot,1999,
p106-107). Sans doute est-ce là une de ces formes les
plus intérieures de l’expression tragique, celle par
conséquent qui s’abreuve à son propre drame, qui
trouverait à ce moment de l’histoire, sous cette
modalité, son gîte et sa puissance (Y.Guilbert,1928,
p.109). Et c’est d’ailleurs autour de cette présence
rugueuse que d’autres éléments marginalisés de la
corporéité vocale, tressent leurs fibres et leurs
couleurs décriées.
Place est ainsi faite à la nasalisation, ce trait vocal
imparfait, au glissando, ce trait proscrit, à la
démesure expressive, cette autre inhibition. En
introduisant des bribes de chant parlé, en se risquant
aux abords du sanglot, en s’abandonnant à l’irruption
brutale de quelque éclat tranchant - qu’il s’agisse d’un
rire, d’un appel ou d’un gémissement, ce répertoire
opère des transgressions sans calcul. Sur son versant
négatif, l’œuvre chantée s’est élaborée sur le
refoulement de toutes ces densités « hirsutes » de la
voix, densités considérées comme malséantes et
impudiques par tous les représentants bourgeois des
bonnes mœurs. Au contraire, passant à côté de ces
scandales de l’impureté, les chansons réalistes des
années vingt, vont dans leur logique et leur passion
interprétatives, explorer texture, puissance et secret
des bas-fonds de la voix. Ces voix affrontées aux bruits
des rues, ces voix de l’énergie portée à ciel ouvert,
ces voix graves sont également des voix du ventre. Elles
sont voyages et métaphores d’un souffle et d’un corps
tirés vers le bas, celui de la déchéance sociale, celui
des insécurités de l’enfance. En effet, cette physique
ne peut exister sans une sémiotique de cette « passionalisation » du
corps, qui est ivresse, transe, extase.
Des paroles qui racontent le plaisir bref et les longs
tourments des ‘mômes de la cloche’, du ‘petit boscot’,
du ‘vieux pataud’, ‘d’Anna la bonne’ ; mais un univers
où naufrage social et chavirement de la personne ne font
plus qu’un ; le tout associé à un traitement musical
servant les valeurs vocales - les plus corporelles - du
souffle et du cri : c’est ainsi que ces chansons vont
transcrire et propager une image mélodique lancinante de
la déchirure, s’adressant à cette part vulnérable,
indicible de nos plus profonds dénuements. Car, par le
biais du contexte évoqué, c’est à de grandes traversées
de la peur, à des sentiments d’effondrement que nous
convient ces musiques vocales. La voix de Fréhel, en
1927, dans ‘J’ai le cafard’ entraîne de façon
exemplaire et pour le thème et pour le timbre, vers ces
sombres contrées de l’être.
En 1943, quand Piaf crée ‘Coup de grisou’, sa
voix porte le malheur poignant de cet homme « aux yeux
brûlés » de lassitude et d’amour.
« C’était un Dieu de l’obscurité…
Le grand jour l’empêchait de parler…
Et il aimait par-dessus tout
Une fille des plaines aux cheveux roux
Après, il a tout fait sauter
La terre, la mine et tout le fourbi
Mais Coup de grisou était guéri, il avait épousé la
nuit »
Le malheur fou de ce mineur amoureux s’impose au fil
d’un crescendo de plus en plus pressant. L’espace
musical est comme saturé. La ligne mélodique, la
puissance vocale, l’orchestration s’enflent jusqu’à la
sensation d’un tumulte interne insoutenable. Cet
indicible là est plein de fureur et de bruit. Il gronde
comme un volcan. Mais la force irradiante de ces états
d’oppression, de ces déroutes de l’être, jaillie de
l’élan et de la culture de ces voix chantées, atteint
sans doute son apogée dans une mélodie composée plus
tardivement lorsque Piaf en orante, entonnera le fameux
« mon Dieu, mon Dieu, mon Dieu laissez-le moi encore
un peu mon amoureux ». Ici, c’est à l’instant même où le
chant s’élève, au moment où s’amorce l’enroulement
incantatoire de la voix que s’opère pour l’auditeur, ce
transport immédiat dans l’intimité d’un effroi. Car
chanter n’est pas dire. Et ces voix – au-delà des
intentions sociales, sentimentales des thèmes
chansonniers de référence – sont virtuellement, comme
toute musique, en étroit rapport avec les tensions, les
murmures assourdis, la vie antérieure d’un non-dit
verbal que chacun porte en soi. Le non-dit de ces
voix-là, l’intime familier, étranger qu’elles enferment
et qu’elles éveillent, c’est l’inouï des blessures qui
chavirent, c’est le non-dit des failles majeures.
Car ces voix surgissent du ventre des villes peuplées
d’un prolétariat nombreux, « dangereux » ; du ventre de
la faim qui propulse la chanteuse sur le trottoir. Elle
se fait ventre et miroir vocal du désarroi parvenant à
développer un quasi toucher sensoriel de la nuit.
Panique de la nuit. Passion de la nuit. L’inouï de ces
voix-là, c’est leur désir d’approche de l’émotion, leur
abandon à l’inconnu du dedans, leur farouche appétit de
coïncidence entre voix projetée et voix intérieure. Il
est frappant de constater que ces chanteuses voudront
dans les conventions d’un répertoire, parler de leur
propre chaos, et trouver via l’énergie du chant, quelque
unité perdue. C’est ce retour sur soi, cette
consolation, cette réflexivité sans concept du chant, ce
sont ces silences, cette insularité nocturne qui vont
s’incarner sur scène (Deniot, 2002). Dans cette extase
et ce code interprétatifs, devenus indissociables, on
peut dire que l’on se situe dans la veine d’un art
baroque - celui où « l’exprimé n’est plus en dehors de
ses expressions », celui où tout signe déplie, replie du
sens (Deleuze, 1988). A ce moment, tout élément, éclat
de voix, éclat de robe, fatigue du geste, puissance du
regard, tout actualise l’âme, tout est métaphore de ses
appels.
En contre-point de ces chants et de leur intime
solitude, on pense à Billie Holiday dont
l’interprétation de ‘ Strange Fruit ’se place dans les
affres et le déchirement d’un semblable désespoir,
désespoir exalté et sublimé dans la toile du chant.
C’est ce dont témoigne Vernon Jarret : « c’était
indescriptible, elle était là en train de chanter çà
comme si c’était vrai, comme si elle venait d’assister à
un lynchage ; voilà ce qui m’a fichu un coup, j’ai cru
qu’elle allait chialer, elle ne regardait personne dans
le public, elle m’a fait l’impression de quelqu’un qu’on
avait blessé, lynché d’une façon ou d’une autre ; quand
je l’entendais chanter, j’imaginais d’autres
sortes de lynchage, pas seulement des gens pendus à un
arbre ; je voyais mon père et ma mère » (D.Margolick,
2000).
Mon approche esquissée en introduction, je peux
désormais la dénommer plus précisément comme tentative
d’élaboration d’une poétique culturelle, sociétale des
voix Le terme de poétique renvoie alors à cette
esthétique cognitive qui, en matière de sciences
sociales, se propose de comprendre les schèmes
rationnels, les schèmes iconiques communs circulant
entre expérience artistique et expérience scientifique
chez les auteurs historiques de la sociologie d’abord ;
puis se propose surtout de dépasser, via ce cheminement
critique, l’évidence de la coupure instituée entre art
et science, tant dans l’approche des phénomènes, que
dans leurs modalités démonstratives que dans leurs
langues argumentatives ou descriptives de restitution
(Brown, 1985).
Cette poétique de la connaissance, je la conçois comme
une dialectique à tenir entre une physique des
sensations et une esthétique des sensibilités,
institutionnellement, psychiquement, attachées à ces
voix de femmes qui, dans l’immanence de rengaines
évidentes et rudes à la fois, font entendre un chant
plus profond, une supplique bouleversante et que l’on ne
peut proférer. Dans cette physique du chant affleure une
mystique suscitant tous les transports de l’interprète
et du spectateur, il s’agit d’approcher en compréhension
l’alchimie de ce mélange et de creuser analytiquement
cette fugitive impression d’art poignant qui en émane
encore.
Graphies et
portraits vocaux
Écrire la voix, c’est se placer du côté d’un imaginaire
ténu, chercher à sculpter une pensée analogique, une
rêverie raisonnée autour d’un timbre, d’une respiration.
C’est peu, mais c’est tentant. Car cet imaginaire
volatile, léger est aussi un imaginaire amoureux. Parler
d’une voix, c’est toujours construire son écriture au
gré d’une identification, en ses logiques entremêlées
d’attrait et de rejet, mais toujours situés dans cette
« hallucination »de l’écoute qui fait que « dans
la voix, j’entends d’autres voix » (Barthes,
1982).
Et là aucun avertissement méthodologique ne peut faire
barrage à l’intuition et l’impression. C’est bien, sur
cette puissance d’agir d’une résonance, sur cette force
bue d’une intonation, d’une saveur mélodique, sur cette
capacité d’un chant à exister en vous, que s’entendent
les premières mesures de l’écriture des corps et des
visages de la voix. Rapport halluciné, jeux
d’identification à l’interprète, c’est cette même
gravité, ce même élan que subissent observateur
obsessionnel ou consommateur ordinaire. De cette même
attitude d’écoute et de vision immergées,
l’anthropologue, l’ethnologue vont tenter de faire
naître une autre écoute qui est à dire. À penser donc,
mais en partance de ce lieu initial où écrire et aimer
sont « le même défi de la connaissance mise au
désespoir » (Fernandes, 1997). En effet si de ce
lieu, on craint « de connaître ce que l’on voit »
(ibidem), si de ce lieu, on débouche sur
l’infiniment inconnu, ce non-savoir n’est toutefois pas
ignorance nue, privée d’alphabet, de symboles et de
correspondances « qui chantent les transports de
l’esprit et des sens » comme l’indique joliment le vers
de Baudelaire.
Car, « si dans ces voix, on entend d’autres voix »,
ce n’est pas là pure expérience phénoménologique, c’est
que de telles voix sont parcourues, d’empreintes
civilisatrices, de strates accumulées de la
représentation qui en apprivoisent le langage. Si
l’observateur parvient malgré tout, à les dire, à
imaginer pour elles quelques traces discursives, c’est
qu’elles s’insèrent dans de longues généalogies
d’images, d’archétypes, d’allégories qui en préfigurent
socialement le texte (Legendre, 2001).
Il y a les images des lignées : ces chanteuses ont leurs
ancêtres et leurs descendantes. Cette mise en écho
d’icônes, de dramaturgies, de persona de la voix
au féminin, constitue déjà l’un des premiers pas
dans le passage au lisible et au prédicable.
L’interprétation est toujours une ré-interprétation.
Il y a les textures des archétypes qui découpent la
silhouette de ces femmes autour de quelques traits et
bio-graphèmes :
Ce sont des croquis de rue, des sanguines du froid, de
l’abandon, de la survie, de la bagarre. C’est l’errance
des ‘mômes de la cloche’ délurés et paumés. On y entend
les sonorités de l’argot. On y retrouve la houle de la
précocité de toutes les épreuves ; maladie, violence,
prostitution et autres expédients nombreux de la
pauvreté n’excluant pas non plus la chance, voire le
miracle. En tout cela se profile une épure de la
féminisation de la misère, une fiction biographique
extrême dont les contours et sèmes mythiques sont
également préparés par l’héritage romanesque et la
critique sociale du XIXè siècle.
Puis il y a le palimpseste des allégories du corps et de
l’âme d’un tragique chrétien ; les chanteuses de la
scène réaliste seront inspirées par les messages d'une
religion populaire tournée vers les grandes sanctifiées,
les grandes icônes d'une théologie mystique, réactivée
durant cette période de la III° République (Maître,
1997). Fréhel, Piaf vouent un culte déclaré à Sainte
Thérèse de Lisieux, celle qui a inversé Dieu en image
bienveillante de la toute- puissance maternelle, celle
qui vénère un Christ de Miséricorde, épris seulement
d'amour sacrificiel. La chanson réaliste s'enracine dans
cet imaginaire du féminin compris entre dévotion et
abjection. Elle se bâtit essentiellement sur le tissage
immémorial, obsédant de la féminité catholique : sur fil
de trame, le thème de la Madone, sur fil de chaîne,
celui de pécheresse ; mais toujours en leurs nuances les
plus oblatives, les plus humainement abandonnées. Et
c'est grâce à ces interprétations d'orante, grâce à
leurs chants traversés par une tradition mystique
affective, qu'au-delà de l'antique image du destin, ces
femmes vont ouvrir l'espace d'une nouvelle intériorité
du souffrir, qu'elles vont incarner dans l'art
populaire, cette métamorphose des passions, qui est en
œuvre tout au long de ce premier tiers du siècle
dernier.
Avec ce texte sociétal silencieusement gravé, observons
alors quelques gestes- phares de ce chanter populaire
pathétique. On remarque d’abord une forte verticalité du
corps immobile ; des bras largement ouverts qui suivent
le mouvement ascendant d’une supplique ou d’un hymne ;
la paume offerte de l’implorante ; des poings serrés
sous la poitrine ; un poing brandi dans la tempête ; des
jeux de mimes ; un effleurement de la joue pour la
caresse absente ; des doigts « secs et nerveux », comme
ceux de ‘l’accordéoniste’, déployés en éventail à la
hauteur du cou ; des paumes s’élevant en corolles le
long des tempes ; des bras en croix, ceux du funambule
ou ceux du Christ. Finalement, cette danse mesurée des
bras et des mains nous conduit toujours au visage – ce
miroir énigmatique des plissés émotifs, ce topos
transcendant de la Passion incarnée. La sainte face
serait-elle la scène augurale, l’espace métaphorique
inconnu du théâtre inouï de ces voix ? Damia est sans
doute celle qui a le mieux cultivé cette mobilisation
méta-physique de la face (Deniot, Dutheil,1997). Elle,
qui a beaucoup chanté les dangers de la mer, nous fait à
même le phrasé hésitant de la voix, à même le tremblé
des lèvres, à même le trouble instantané du regard,
cheminer dans l’angoisse du naufrage et les mondes
ténébreux des naufragés, ce dont le film (1927) de
Maurice Coche garde encore l’archive saisissante
(ibidem).
« Libérez vos visages de leurs portières, offrez-les
nus, et magnifiques sans truquages, dans la toute
splendeur de leur adorable sensibilité » déclarait en
1928, Yvette Guilbert dans son guide inspiré de
l’interprétation, véritable ode à la face et au corps
immergés dans l’onde poétique de la plus humble chanson
dont elle veut transmettre la vision, le transport et
même la part d’initiatique élévation « abandonnez-vous,
riez, pleurez sans honte, en exprimant la vérité, vous
exprimez Dieu, et ainsi, vous divinisez votre art »
(Guilbert, 1926, p.43).

Ici son visage s’expose, ouvert et
sculpté par son art. Yvette Guilbert, diseuse et
pionnière en ce travail de représentation intériorisée
de la voix chansonnière mêlant nuances de vie, de corps
et d’âme, livre ainsi à l’image, cette empreinte de
l’extase d’où pourrait sourdre,
abandonné, illuminé le chant de ce geste.
Joëlle-Andrée Deniot
Professeur de sociologie à l'Université de Nantes
Habiter-Pips, EA 4287
Université de Picardie Jules Verne - Amiens
Membre nommée du CNU
Dépôt Légal Bibliothèque Nationale de France
N°20050127-4889
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Columbia, CD, 1994
Ce
texte est paru dans Le Volume N° 2 - French Popular
Music 2003
Dépôt légal février 2004 - ISSN : 1634-5495

Joëlle-Andrée Deniot
Professeur de sociologie à l'Université de Nantes
Habiter-Pips, EA 4287
Université de Picardie Jules Verne - Amiens
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